La concurrence dans le secteur du funéraire en France

Cette semaine, je vous propose d’explorer la concurrence dans le secteur funéraire français à travers une analyse complète. Dans cet article, nous examinerons son champ d’application du niveau national au niveau départemental. Le mois prochain, nous traiterons du niveau communal et même des IRIS. Pour réaliser cette analyse, je mettrai en relation le nombre d’établissements funéraires, avec leurs différentes habilitations, et le nombre de décès au niveau départemental.

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Ce mois-ci, je vous propose d’explorer la concurrence dans le secteur funéraire français à travers une analyse complète. Dans cet article, nous examinerons son champ d'application du niveau national au niveau départemental. Le mois prochain, nous traiterons du niveau communal et même des IRIS . Pour réaliser cette analyse, je mettrai en relation le nombre d’établissements funéraires, avec leurs différentes habilitations, et le nombre de décès, au niveau départemental. 

1. Historique

Les services funéraires sont étroitement réglementés et 10 407 opérateurs disposent de l'autorisation nécessaire pour poursuivre leurs activités. Des mises à jour doivent être réalisées tous les 5 ans (parfois 6 ans) via un cycle de renouvellement de l'autorisation. 

La liste complète des habilitations funéraires est disponible via les préfectures. Grâce aux progrès de l'harmonisation de ces listes (en 2020, c’était un sacré bazar !), notre capacité à analyser les autorisations s'est considérablement améliorée avec l'introduction de deux formats (complet et partiel). Seulement 30 % des listes des habilitations sont complètes, c’est-à-dire intègrent la date de démarrage et de fin de l’habilitation, ainsi qu’un numéro complet. Malgré ce progrès, les bases de données incomplètes posent toujours problème, notamment lorsqu'un acteur cesse son activité sans dénoncer son autorisation - passant souvent inaperçu car 5 ans c’est long.

1.  Présentation des différentes prestations funéraires

Les habilitations recouvrent plusieurs services. Chaque opérateur choisit les habilitations pertinentes pour lui.

En toute logique,  de nombreux établissements sélectionnent le maximum d’autorisations.

1. Statut des pompes funèbres

Nous avons analysé chaque habilitation afin d'authentifier son utilisation. Pour cela, nous avons effectué des recherches sur Google, notamment via l’existence d’un site à jour et Google Maps qui permet de visualiser un lieu (même si Google Maps n’est pas toujours bien actualisé). 

Nous avons donc créé un listing de statuts opérationnels qui correspond à une réalité économique. Par exemple, nous avons identifié près de 497 habilitations correspondant à une agence définitivement fermée, 217 habilitations déposées par des ambulanciers, 79 habilitations correspondant à des entrepôts et même 11 qui correspondent à des garages ! 

Voici une analyse par statut :

1. Répartition des habilitations par département

Deux départements, le Nord (59) et le Pas-de-Calais (62), se distinguent comme des pôles majeurs d'autorisations en raison de leur forte population. Les Bouches-du-Rhône (13) et l’Ille et Vilaine (35) suivent en termes de nombre d'autorisations. Les géographes ne seront pas surpris de ce résultat, puisque ces territoires font partie des zones les plus peuplées de France.

1. Combien y a-t-il d’agences de pompes funèbres en France ?

Après avoir effectué des recherches sur le nombre d'établissements funéraires en France, nous avons observé que 7 583 ont l'autorisation d'organiser des obsèques. Après des vérifications via Google Maps et les sites web assurant leur visibilité sur les moteurs de recherche, ce chiffre se réduit à 6 508 agences. Nous avons vérifié qu'elles sont toujours en activité en contactant chaque agence 5 fois par téléphone : ce chiffre a encore été réduit, à  6 423 points de vente actifs dans tout le pays.

Ces vérifications confirment que les départements du Nord (59), du Pas-de-Calais (62) et des Bouches-du-Rhône (13) sont les 3 départements qui comptent le plus d’établissements funéraires en France. En effet, comme nous le verrons par la suite, ces 3 départements ont une population et un nombre de décès importants. 

1. Évolution du nombre de nouvelles agences

Depuis le début de l'année 2020, notre équipe s'est lancé un défi unique : suivre précisément la création d'agences funéraires en France. Grâce aux autorisations funéraires (listes des préfectures), à l'enregistrement de nouvelles sociétés (via pappers.com ou societe.com) et aux réseaux sociaux tel que Linkedin, nous avons atteint cet objectif. 

Le graphique ci-dessous en donne le résultat. 

Nous n’avons pas encore assez de recul pour analyser la création de nouvelles agences. En réalité, il nous faudrait effectuer cette analyse avec le solde net, soit le nombre de nouvelles agences créées moins le nombre d’agences qui ont fermé dans la période. Il nous reste donc encore un peu de travail à faire ! Néanmoins, nous avons clairement identifié une nouvelle dynamique dans la création d’agences depuis quatre ans, notamment avec OGF qui crée une cinquantaine d’agences par an. Par ailleurs, pour certains acteurs, la création reste la seule solution, car souvent les acteurs en place ne sont pas à vendre. Il est probable que nous n’ayons pas encore intégré toutes les nouvelles agences créées en 2022 et que ce chiffre soit sous-estimé.

OGF et Funecap sont deux entreprises majeures du funéraire en France. Mais dans quels départements sont-elles les plus présentes ? 

Notre analyse a mis au jour une carte qui révèle leur présence physique à travers les départements français. Plus les couleurs sont dans les ocres, plus le ratio est favorable à la présence des deux leaders. Par exemple, dans le département de la Gironde (33), 60 % des agences sont détenues par des indépendants. À l’inverse, en Eure-et-Loire (28), ces deux acteurs ont 57 % des parts du marché en s’appuyant sur le nombre d’agences. Cette part de marché est théorique, car chaque agence ne réalise pas le même nombre de décès, mais elle permet de se faire une idée.

Afin d’analyser la concurrence, il est nécessaire d’analyser les décès en France. La corrélation entre le nombre de décès et le nombre d’agences de pompes funèbres est évidemment très forte.

Répartition des décès en France par département

En 2020, la France a connu un nombre historiquement élevé de décès dans tous les départements, et ce niveau s'est maintenu pendant trois ans. Cependant, les évolutions ont été très différentes au cours de ces trois années. La première vague de Covid a touché les départements d’Ile-de-France et de l’Est. En 2021, les différentes vagues ont nettement plus touché les départements du Rhône (69) et de l’Ouest de la France. 

Cette carte montre la moyenne des décès par département en 2020, 2021 et 2022.

Ainsi, dans le département du Nord (59), le nombre moyen de décès s’élève à 25 561, alors que dans les Bouches-du-Rhône Rhône, le chiffre est de 21 408. Le nombre de décès le plus faible est en Haute-Corse (2B), avec 864 décès.  

Afin de mesurer de manière simple le niveau de concurrence en France, nous avons créé un ratio que nous avons appelé l’indice de compétitivité. C’est le rapport entre le nombre de décès et le nombre d’agences, ramené à un niveau mensuel. Ainsi, avec ce ratio, nous pouvons comparer simplement le nombre moyen de décès traités mensuellement par une agence. 

La moyenne nationale du nombre de décès traités par an et par agence est de 8,3, sachant que le département dont le ratio le plus faible est la Creuse (5,2) et celui dont le ratio est le plus important est l’Isère (16).

Lorsque vous déterminez la compétitivité du marché, gardez à l'esprit que plus un indice est proche de zéro, plus le niveau de concurrence est élevé.

1. Ratio par département

L’Isère (38) se distingue par un indice de plus de 16, donc une très faible concurrence. En effet, il y a une forte concentration du nombre de décès sur Grenoble, avec un acteur de référence qui capte une grande partie des décès. C’est le seul département de France qui affiche cette singularité. Derrière l’Isère, le département avec la plus faible concurrence est la Haute-Savoie (74), avec un indice de 12,7.

Les Bouches-du-Rhône (13) ont aussi un indice élevé, tout comme Paris (75) avec 11,6. Cela montre que ce n’est pas parce qu'il y a beaucoup d’agences et de décès que la concurrence est forte. 

À l’inverse, certains départements disposent de nombreuses agences, comme la Creuse (23), la Haute-Saône (70) et la Haute-Loire (43) qui affichent un indice de 5,4. Ces départements ruraux bénéficient d’un nombre d’acteurs important, car ils sont souvent multi-services (par exemple ambulancier).

La carte ne permet pas d’identifier des spécificités régionales. En effet, les spécificités restent plus pertinentes à analyser au niveau du département, voire de la commune.

1. Ratio par département en nuage de points

On peut constater sur ce graphique que les écarts entre départements sont très importants. Sans afficher tous les départements, il est visible que la répartition est très différente d’un département à l’autre. 

Ce graphique donne une idée de la répartition de l’indice avec deux autres dimensions : le nombre de décès (taille du rond) et le nombre de pompes funèbres (sur l’axe des ordonnées). 

En s’appuyant sur l’indice de compétitivité, on constate donc que la concurrence dans les services funéraires est réellement présente. Pour autant, une agence ne gère en moyenne que 8 décès par mois, ce qui représente environ 2 décès par semaine. Cela semble finalement modeste. Bien évidemment, il faut relativiser ce chiffre, pour deux raisons. d’une part, une agence propose d’autres services comme la marbrerie, la vente de plaques, etc. D’autre part, le nombre de décès par semaine peut fortement varier. Cette variation est l’une des difficultés majeures du métier. Très variable sur le territoire, le niveau de concurrence doit s’analyser département par département, commune par commune : cela sera l’objet du prochain article, dans lequel je m’intéresserai plus particulièrement à deux département, afin de pouvoir mieux comparer. Que ceux qui souhaitent influencer mon choix des deux départements sélectionnés n’hésitent pas à m’envoyer un email !